Constante dans sa logique de violence contre les populations vivant autour de son site pétrolier, Maurel et Prom, l’entreprise pétrolière acitoyenne qui tue l’environnement dans le canton Lacs du Sud, continu à déverser son pétrole sur les eaux et les sols du Moyen-Ogooué, faisant ainsi fi des récriminations récurrentes des populations qui crient leur colère dans l’indifférence générale depuis le début des années 2010. L’accès au site pétrolier ONAL, comme à ses alentours immédiats, étant strictement interdit au public, seule une enquête sérieuse menée par un organisme indépendant, à la demande du Gouvernement, peut aujourd’hui nous édifier sur l’ampleur des dégâts causés et leurs conséquences en termes de pollution et de santé.
Cependant, des images des premiers déversements de pétrole, dans les rivières d’Ezanga, existent encore. Immortalisées dans un documentaire qui circule parfois sur les réseaux sociaux, quand il n’est pas diffusé sur les antennes de la télévision gabonaise, ces images inédites sont une exclusivité de la défunte RTG1, signée de la main et de la voix de votre serviteur. Ce grand reportage qui dure une trentaine de minutes fait partie des documentaires commandés en 2010 par Madame Laure Olga Ngondjou, ancienne Ministre de la Communication.
Au Gabon l’information porte très rarement sur des compatriotes méritants qui ont rendu de bons et loyaux services à notre société. Voilà pourquoi il me parait juste d’évoquer ici le cas de cette grande Dame de République. Pour écrire que sur la centaine de Ministres qui ont défilé à la tête du Ministère de la Communication depuis le premier Gouvernement Oye Mba, formé au mois de mai 1990, jusqu’au coup de liberté des militaires, Laure Olga Ngondjou est la seule Ministre dont les actions ont marqué notre paysage médiatique. Elle a laissé des souvenirs durables de son bref passage à la tête de ce département ministériel ô combien stratégique, mais aussi ô combien négligé et par conséquent « sinistré ». Comme l’a d’ailleurs constaté l’actuelle Ministre de la communication, Porte-parole du Gouvernent, Madame Laurence Ndong.
Entre autres innovations, la Ministre Olga Ngondjou, estimant qu’en journalisme, on a toujours fait du bon et du vrai avec du vieux, avait fait appel aux anciens journalistes audiovisuels qui avaient su hisser jusqu’au milieu des années 90, la Radiotélévision Gabonaise (RTG1), à un niveau de compétitivité jusqu’ici inégalé ; pour conduire des équipes de reportage à travers les neuf provinces du pays. C’était lors des préparatifs des cérémonies qui devaient marquer le premier cinquantenaire de l’accession du Gabon à la souveraineté nationale. Ceux qui vivent régulièrement au Gabon, et qui ne sont pas amnésiques, se souviennent encore de cet évènement historique qui avait tenu les Gabonais en haleine pendant plusieurs semaines. Lequel évènement m’avait donné l’opportunité, à la tête de l’une des équipes de reportage désignées par la Ministre Ngondjou, de découvrir les beautés des provinces de la Nyanga, de la Ngounié et du Moyen-Ogooué.
Dans cette dernière province, un jour sur le champ pétrolier ONAL, mon caméraman et moi avions réussi à tromper la vigilance du petit teigneux chef blanc de service qui, sans égard pour l’importance de notre mission, nous avait interdit l’accès du site pétrolier de Maurel et Prom. A son insu, pendant une demi-heure environ, nous avons pu prendre des images des premiers sites de pollution en Ezanga, puis réaliser des interviews. Malheureusement, la préoccupation née de cette pollution, qui en cachait d’autres, avait été très vite escamotée du débat par les autorités politiques et administratives du Ministère du Pétrole, que les populations des lacs du Sud accusent depuis lors de complicité dans le détournement de l’enveloppe annuelle de 100 millions de francs CFA destinée au développement durable de leur canton. Lequel voit déstabilisée chaque jour un peu plus son économie qui repose essentiellement sur la pêche artisanale. Ici comme dans le canton voisin de l’Ogooué aval, les poissons sont de plus en plus imbibés de produits chimiques et pétroliers indispensables à l’activité de la production du pétrole brut.
Comme un chat échaudé, l’opérateur pétrolier le plus dédaigneux du Gabon, bousculé par les colères répétées des riverains qui dénoncent sans cesse ses pratiques sales sur les rivières, déverse désormais ses effluents dans la forêt qui entoure ONAL son champ pétrolier. Drôle de façon de lutter contre les impacts écologiques pour ce prétendu grand défenseur de l’environnement. Car en même temps que les résidus toxiques sommairement enterrés impactent les sols et abiment la nappe aquifère souterraine, les pluies très fréquentes dans cette zone drainent les produits chimiques et pétroliers vers les mêmes eaux qui ne seront plus jamais de bonne qualité. L’air respiré par les riverains est pour sa part pollué chaque jour que Dieu fait par le brûlage des incondensables pétroliers des torchères source de production des gaz à effet de serre. Quand bien même les polluants résiduels seraient dispersés affirme-t-on, ce qui limiterait la concentration en substances toxiques au niveau sol.
Peu importe, le pétrole est dangereux parce qu’il tue les mammifères marins, le poisson et parfois les hommes. Je rappelle en effet que la pollution des eaux des lacs du Sud a endeuillé, il y a quelques années, le village Ntsua : l’un des plus proches du site pétrolier ONAL, qui a perdu au moins un de ses habitants, mort après avoir consommé l’eau fraichement polluée par l’activité pétrolière destructrice de Maurel et Prom. Aux dernières nouvelles, la région de Ngola, sur la route de Port Gentil, régulièrement fréquentée par les bateaux de Maurel et Prom qui transportent du matériel, serait également impactée par les résidus toxiques accumulés depuis une vingtaine d’années.
Je mets au défi l’entreprise acitoyenne Maurel et Prom de prouver que depuis 2004-2005 date du début de son activité d’exploration pétrolière, elle a, comme elle le proclame partout, investi énormément d’argent dans la protection de l’environnement d’une part, et que d’autre part sa violente industrie pétrolière cohabite sans heurt avec les hommes et la nature dans cette région de près 500 kilomètres qui part de Ngola aux Lacs du Sud ; l’une des régions les plus bio diverses au monde.
Plutôt que de se complaire dans des simulacres de reboisement de la mangrove à Port Gentil, le pétrolier le plus pingre du Gabon doit d’abord se préoccuper des compenser les dommages causés par le pétrole comme prévu dans sa fumeuse stratégie de développement durable du canton des lacs du Sud, dévoilée lors du séminaire qu’il a organisé à Lambaréné en octobre 2009, et qui a accouché d’une souris.
D’où cette question pertinente et non moins lancinante que les Migovéens n’arrêterons pas de poser à la conscience du Directeur Général de Maurel et Prom, aussi longtemps qu’ils n’auront pas obtenu de réponse satisfaisante : pourquoi avoir privé Lambaréné d’une opportunité de développement en choisissant curieusement d’aller louer un siège à Port Gentil, au lieu de doter la ville de son très célèbre compatriote Schweitzer d’un immeuble du pétrole à la hauteur des énormes bénéfices engrangés chaque année par l’exploitation du beau pétrole vert d’Ezanga ; et créer ainsi des emplois pour les ressortissants du Moyen-Ogooué ? Sachant que l’argent du pétrole de Port Gentil n’a jamais irrigué le reste du pays, notamment Lambaréné.
Pour ceux qui ne le savent pas, Maurel et Prom et les autres pilleurs contemporains de notre pétrole venus uniquement pour l’exploiter à destination du marché mondial, bénéficient, pour s’implanter au Gabon, du soutien massif des banques françaises et européennes. Mais ces affairistes Français préfèrent investir à peu de frais, louant des sièges plutôt que d’en construire, pour engranger chaque année des centaines de milliards d’argent facile. Pourquoi l’Etat n’oblige-t-il pas ces nouveaux investisseurs désinvoltes à suivre un tant soit peu les exemples de Shell Gabon et Elf Gabon, qui ont partagé un peu de leur bonheur avec les Gabonais ? A leur époque, les travailleurs Gabonais, qualifiés ou pas, étaient embauchés et respectés.
Il n’existait pas d’organisations mafieuses comme celles qu’incarnent ces sociétés prestataires de services, qui vont recruter illégalement à l’étranger, maltraitent tout aussi illégalement les travailleurs Gabonais ; usant et abusant par-dessus tout de l’utilisation illégale de la mise à disposition du personnel. Il n’y avait pas moyen, à cette époque, de violer impunément les contrats de travail comme le fait Ogooué Maritime Location, ce petit nid de truands, qui ne déclare pas ses travailleurs à la CNSS et qui confisque et « mange » les salaires de ses employés qui sont interdits de broncher sous peine d’être licenciés.
Autant de pratiques et de méthodes vexatoires à l’égard des travailleurs Gabonais, inacceptables dans un pays normal, et qui sont à l’origine des mouvements de grèves de plus en plus fréquents dans ce secteur manifestement livré aux pillards. Maintenant que le nouveau chef de l’Etat a demandé au Ministère du Travail d’accélérer la révision du code du travail, pour permettre notamment à l’Inspection spéciale chargée du secteur pétrolier (ISTRAP) de jouer véritablement son rôle de gendarme, chargé de réprimer les auteurs des infractions et au code du travail et au code pétrolier, cette petite pègre qui gangrène le secteur pétrolier depuis des décennies n’a qu’à bien se tenir.
Content et satisfait des dernières injonctions du Président de la Transition qui a sommé ces affairistes nains de la haute finance internationale, locataires des maisons au Gabon depuis des décennies, de construire des sièges à la hauteur des très gros bénéfices qu’ils tirent de notre pétrole d’une part, et d’autre part, de l’ordre formel que le Président du CTRI a adressé à leurs complices locaux, voleurs repus, ayant indûment perçu des actions sur les divers champs pétroliers de les rendre à l’Etat, j’annonce ici la mise en place prochaine d’un Collectif de défense des intérêts vitaux du Moyen-Ogooué (CDIV-MO).
Il reste ouvert à la jeunesse consciente ainsi qu’à tous les patriotes éveillés et révoltés, respectueux des lois et des institutions de notre pays. Des femmes et des hommes qui ne veulent plus rester muets, parce qu’ils sont maintenant déterminés à lutter contre les mauvaises pratiques du passé et leurs auteurs. Pour qu’une aurore se lève dans notre belle Province G3, et dans le Gabon entier, sous la bannière de la nouvelle République en gestation.
Notre collectif compte intenter un jour un procès en justice contre Maurel et Prom. Ce sera pour nous l’occasion d’exposer, aux yeux des Gabonais et du monde entier toutes les choses sales cachées jusqu’ici ; tout ce qui a été commis de sombre sur nos sols, tous les maux enfouis sous nos eaux et sous nos terres par l’activité pétrolière impitoyable de cet étrange opérateur pétrolier. Qui ne manque pas de culot, et qui a choisi délibérément d’enfumer régulièrement l’opinion quant à sa prétendue implication déterminante dans la lutte contre la pauvreté dans la province Moyen-Ogooué.
Mais personne ne sera plus dupe des mièvreries du service communication de Maurel et Prom, qui attend toujours de voir son employeur mis en difficulté pour sortir de sa torpeur et répandre le mensonge honteux. Des menteries qui tendent notamment à faire croire que cette entreprise pétrolière acitoyenne respecte effectivement les engagements pris dans le cadre de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE).
A ce propos, le jeune confrère du journal qui a ouvert ses colonnes à Maurel et Prom doit savoir deux choses : la première est que le Gabon dispose d’une presse relativement libre, cadre approprié pour l’expression d’une presse d’investigation. Deuxièmement, cette variante, qui décrit une presse professionnelle, a pour spécificité de ne jamais céder à la tentation de livrer des informations ou des faits douteux sans vérifications et recoupements préalables. Car son but est d’informer de manière objective et incontestable au sujet des faits avérés. D’où son devoir de privilégier son indépendance des pouvoirs politiques et économiques.
Maurel et Prom parle, toute honte bue, de travaux de réfection qui ont coûté seulement 340 millions de CFA à Lambaréné, et dans les lacs du sud. Là où nous constatons de simples replâtrages, des ravalements de façades, réalisés à la hâte sous la pression du pouvoir déchu, à la veille de l’ouverture de la dernière campagne électorale, par des entreprises triées sur le volet et spécialisées dans la surfacturation. Avec la bénédiction des tristement célèbres ex-collégiens du bord de mer. Il en est de même pour le ridicule plateau sportif pompeusement qualifié de multisport (un terrain de basket sur lequel on peut aussi pratiquer le volley-ball), construit pour bluffer l’électorat jeune et inconscient. Un machin qui demeure jusqu’ici fermé au public.
Exception faite du petit dispensaire du village Ndama, que Maurel et Prom nous montre, dans les jours qui viennent, sur une chaine de télévision professionnelle, les voiries, les écoles, les dispensaires, les maisons d’enseignants, les pompes et les forages construits, je dis bien construits, depuis bientôt seize ans à Lambaréné et dans les lacs du Sud, et qui fonctionnent. Là aussi, je mets au défi notre pétrolier bienfaiteur de prouver que le forage, paru en photo dans l’Union du 12 décembre dernier, est bien son œuvre à lui, et que cet ouvrge n’a rien à voir avec le vieux puits que je connais, qui a été foré en 1998 au quartier Petit Paris 3, dans le deuxième arrondissement de Lambaréné, par un homme politique de cette localité.
Gilles Térence NZOGHE. Journaliste.